« Passons sur l’autre rive… »
Des personnes éprouvées par la souffrance psychique ou liée à un état dépressif se sont retrouvées pour échanger sur le passage la « Tempête apaisée » dans l’évangile selon saint Marc. Echos des partages.
Echos du partage
- Je vois les mots « Passons sur l’autre rive ». Qu’est-ce que ça veut dire ? Passons-nous sur l’autre rive ?
- Pour moi les deux rives, c’est le chemin de la vie, de la naissance jusqu’à la mort. Et sur ce chemin, il y a plus que des tempêtes ! C’est un chemin sinueux. Je ne sais pas à quelle rive de ma vie je suis, j’espère que l’autre rive est loin
- Moi, j’ai eu beaucoup de problèmes, alors la tempête, ça me connait. Quand je perds l’équilibre et que je tombe, c’est une tempête, je suis pleine de douleurs. Je ne passe pas sur l’autre rive car je suis obligée de me soigner. Quand ça se calme, je passe sur l’autre rive.
Pour moi ces deux rives, je ne les vois pas comme un chemin de la naissance à la mort, mais plutôt comme un passage de la rive de la peur à la rive de la confiance.
- Pour moi ces deux rives, je ne les vois pas comme un chemin de la naissance à la mort, mais plutôt comme un passage de la rive de la peur à la rive de la confiance. Si on ose réveiller Jésus dans la tempête, il nous fera passer à la confiance, il nous apaisera. Il le fera d’ailleurs, même si on ne lui demande rien mais qu’on a confiance en sa présence !
- Pour moi, ce chemin de passage entre les deux rives, c’est le chemin de la résurrection. L’autre rive, c’est le calme de la résurrection.
- Personnellement, j’ai eu une grosse tempête quand j’avais 13 ans. Ma mère était malade alcoolique. Chaque nuit elle gémissait. Je ne dormais pas, je priais, je priais pour qu’elle s’arrête de gémir. Et pourtant, je n’avais eu aucune éducation religieuse… Et un jour, elle s’est arrêtée de gémir. Je me suis dit à ce moment-là qu’il y avait bien quelqu’un là-haut qui apaisait la tempête. Et moi, j’étais là pour le lui dire. C’est comme ça que j’ai cru en Dieu !
- On peut guérir, on peut apaiser. L’autre rive, oui, mais pour y aller il y a plein de vagues et de trous. Ça a été dur. Ma famille m’a beaucoup aidée, car je ne pouvais pas compter sur mes parents. C’est toute seule que je suis allée à l’église. Sinon, je n’aurais jamais cru en rien !
Personnellement, j’ai eu une grosse tempête quand j’avais 13 ans. Ma mère était malade alcoolique. Chaque nuit elle gémissait. Je ne dormais pas, je priais, je priais pour qu’elle s’arrête de gémir.
- C’est quand on relit sa vie, qu’on se rend compte que Dieu était là. Après coup, on se dit qu’on n’aurait jamais pu passer une épreuve sans la présence de Dieu.
- Oui, Stan Rougier dit « Le Seigneur était là, et je ne le savais pas »
- Sur ce chemin de tempête, certains sont nos anges gardiens, d’autres non. A un moment, j’ai fait de nombreuses bêtises. J’ai toujours eu quelqu’un qui m’a empêché d’aller plus loin. J’ai toujours pensé à mon ange gardien.
- Ça m’est arrivé aussi !
- Est-ce que tu as réveillé Jésus à ce moment-là pour lui demander de t’aider au milieu de tes problèmes ?
- A ce moment-là, peut-être pas. Mais je me disais que j’étais protégée.
- Comme un cadeau reçu sans rien demander ?
- Oui, c’est ça !
- Quand j’étais rebelle, j’essayais de faire le bien mais parfois je ne pouvais pas, je n’acceptais pas qu’on profite de ma personne.
- Parfois, on vit à l’encontre de l’Evangile ! Être apaisé, par moment c’est dur…
Quand on a des problèmes et qu’on ne s’en sort pas, les croyants autour de nous disent parfois « la foi doit te porter ». Mais on peut être croyant et dépassé…
- Quand on a des problèmes et qu’on ne s’en sort pas, les croyants autour de nous disent parfois « la foi doit te porter ». Mais on peut être croyant et dépassé…
- Les disciples, ils étaient un peu en colère contre Jésus, ne comprenant pas pourquoi il ne faisait rien alors que la barque allait couler. Moi, je ne suis pas en colère contre Dieu mais contre moi-même, j’ai une colère monstre ! Quand je ne peux en parler je tombe en dépression.
- En matière de tempête, tout récemment, j’ai encore eu des problèmes de santé supplémentaires et on m’a annoncé que si mes reins continuaient à ne pas bien fonctionner, je pourrais éventuellement être dialysée. Ça en plus du reste ! Ça a été une sacrée tempête. Avant de savoir ce qu’il en serait, j’ai dit au Seigneur, « non, Seigneur, pas ça encore en plus ! » On m’a fait attendre avant de me donner le résultat. Alors, j’ai prié, j’ai réveillé le Seigneur comme les disciples dans la barque, et là, le calme s’est fait. Je me suis remise entre ses mains. Je continue aujourd’hui à lui demander sa force !
- Je vis continuellement en tension, en conflit avec mes parents. Ils sont eux-mêmes en conflit entre eux. Ils n’acceptent pas ce que je fais, ce que je suis. Le dialogue est difficile, sinon impossible. Ça me crispe tellement que j’en ai mal physiquement. Je suis en colère contre moi, je me sens coupable et je ne parviens pas à en sortir. Ça me fait du bien de l’exprimer.
- C’est ce qui est décrit dans le texte. La tempête, elle engloutit complètement. Les vagues remplissaient la barque. Quand on est dans la grande difficulté, ça nous envahit complètement.
« Tu vois Seigneur ma souffrance, ma culpabilité, mon impuissance dans cette relation à mes parents que j’essaie pourtant d’aider. Donne-moi ta paix, augmente la confiance en toi.»
- Essayer de se décentrer aide souvent. L’exprimer à d’autre, l’exprimer au Seigneur, tout simplement ? En lui disant les choses telles qu’elles sont. « Tu vois Seigneur ma souffrance, ma culpabilité, mon impuissance dans cette relation à mes parents que j’essaie pourtant d’aider. Donne-moi ta paix, augmente la confiance en toi » chacun avec ses propres mots.
- C’est ça ! Moi, j’ai été étonnée de la phrase « Ils emmenèrent Jésus comme il était ». Jésus n’était pas en habit d’apparat pour calmer la tempête. Non, juste comme d’habitude. Je pense que c’est important de se présenter au Seigneur juste comme on est… Vous connaissez la pub de Mc Do « Venez comme vous êtes ! » C’est exactement ça… « Seigneur tu sais comme je suis, en colère, je ne me trouve pas à la hauteur, etc… Toi tu le sais, alors je viens devant toi, comme je suis, en confiance, te déposer ma souffrance pour que tu la portes ! »
- Mais moi, je ne sais pas dire des mots comme ça à Dieu. Je n’ose pas.
- Parle-lui juste comme tu nous parles… il écoute.
- Oui, j’entends, mais déjà gérer les soucis de ma mère me met sur les nerfs. Je n’arrive pas à me coucher alors que suis fatiguée. Je n’arrive pas à être sereine. Ma mère a toujours été dans la non-acceptation de mon rythme et me critique. Je ne suis pas à l’aise dans ma famille. Je suis bien au dehors. Comment ne pas s’en vouloir et être ami avec soi-même ?
- Ce texte nous parle de confiance en Dieu quand on a des difficultés. « Pourquoi n’avez-vous pas encore la foi ? » Oui, pourquoi n’avons pas encore la foi ? On a parfois envie d’accuser Dieu quand on a des difficultés. Ça me fait penser à Sainte Faustine à qui Jésus est apparu et qui lui a demandé de le représenter tel qu’elle le voyait avec cette mention en bas du tableau « j’ai confiance en toi ». C’est ainsi que le dimanche qui suit Pâques a été dédié à la miséricorde.
J’ai beaucoup de mal à comprendre la miséricorde, beaucoup de mal à me confier à Dieu.
- Oui, essayer de ne pas accuser Dieu malgré la tempête. Pouvoir lui dire « puisque tu es tout-puissant, Seigneur, tu vas m’arranger le coup » Vous connaissez l’histoire de cette personne qui marche dans le désert. Au bout d’un moment, elle se rend compte qu’il y a des traces de pas à côté d’elle. Quelqu’un l’accompagne ! Puis à un moment, elle ne voit plus de traces et elle récrimine contre Dieu. Tu m’as abandonné ! Et Dieu de répondre « Non ! à ce moment-là, je te portais ! »
- C’est Ademas de Borros qui l’a écrit dans son livre les pas sur le sable.
- Je comprends et c’est beau, mais dans ma tête, je ne l’envisage pas. Je culpabilise. Je suis tellement sûre de ne pas être à la hauteur. Dieu ne pourrait rien faire pour moi. J’ai beaucoup de mal à comprendre la miséricorde, beaucoup de mal à me confier à Dieu.
- Dans la barque de l’Evangile, on peut se dire que même si les disciples n’avaient pas réveillé Jésus, ils n’auraient pas coulé, car Jésus était là.
- Peut-être, mais moi quand j’entends, « pourquoi êtes-vous si craintifs ? » je suis dedans, je me fais des reproches, je bloque.
- OK, tu es comme ça. Ton histoire t’a forgée ainsi. Mais Dieu est là quoi qu’il arrive. Il me semble important d’accepter son histoire. Ce sont nos racines, notre histoire nous constitue et nous ne pouvons pas faire sans. Même si elle implique pour nous des difficultés aujourd’hui, elle a aussi produit des richesses. Il me semble que prendre la barque de Jésus nous suffit, il est là, il fait le reste. Mais y monter. Lui faire confiance. Même si nous sommes encore près de la rive de départ, c’est super, on a embarqué ! Si possible y mettre les 2 pieds pour ne pas faire le grand écart…
Il me semble que prendre la barque de Jésus nous suffit, il est là, il fait le reste. Mais y monter. Lui faire confiance. Même si nous sommes encore près de la rive de départ, c’est super, on a embarqué !
- Pour moi, la barque, c’est l’Eglise, mais aussi la famille, les amis, c’est la confiance en Dieu.
- Mais je n’ai plus envie de prier !
- Il y a des tempêtes qui durent longtemps. Je connais quelqu’un comme ça.
- Si on était attentifs à tous les signes de confiance que le Seigneur nous donne, ça nous permettrait peut-être de faire des pas de plus
- Qui dit confiance dit s’abandonner… C’est difficile !
- Oui, c’est difficile, mais la confiance en Dieu, c’est du concret, ce n’est pas qu’une belle idée, si on parvient à reconnaître ces multiples signes de Dieu, comme le témoignage de notre amie tout à l’heure avec sa maman malade.
Recueilli par Geneviève Robert
Juin 2024
Evangile selon saint Marc
La tempête apaisée
(Mc 4, 35-41)
Ce jour-là, le soir venu, il dit à ses disciples : « Passons sur l’autre rive. » Quittant la foule, ils emmenèrent Jésus, comme il était, dans la barque, et d’autres barques l’accompagnaient. Survient une violente tempête. Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà elle se remplissait. Lui dormait sur le coussin à l’arrière. Les disciples le réveillent et lui disent : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? » Réveillé, il menaça le vent et dit à la mer : « Silence, tais-toi ! » Le vent tomba, et il se fit un grand calme. Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez-vous pas encore la foi ? » Saisis d’une grande crainte, ils se disaient entre eux : « Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? »
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« Amitié Espérance – Arc en Ciel »
Amitié-Espérance-Arc-en-Ciel propose une présence auprès de personnes éprouvées par la souffrance psychique ou liée à un état dépressif.
Le mouvement rassemble des personnes qui témoignent de l’amitié et de l’Espérance au cœur même de leur fragilité. Il se veut un lieu d’accueil, d’écoute, de partage, de rencontres, au travers des expériences de la vie ordinaire. Il permet de cheminer au sein d’un groupe, composé d’accompagnants et de personnes fragiles. L’isolement peut ainsi être brisé. Le groupe est un espace convivial où chaque personne est accueillie, écoutée…
Pour que chacune conserve toute sa dignité et prenne sa place dans la société et dans l’Église. Ce mouvement diocésain est sous la responsabilité du Service de la Pastorale de la Santé du diocèse de Pontoise.
Prière
Seigneur,
Quand le bruit du quotidien nous empêche d’entendre ta voix,
Quand le bruit de nos soucis couvre tes paroles d’espérance,
Quand le tumulte de la vie semble l’emporter, éveille nos cœurs à ta Parole.
Seigneur,
Quand nous n’arrivons plus à discerner ce qui est prioritaire,
Quand nous ne voyons plus que l’ombre des choses,
Quand nous ne savons plus distinguer l’essentiel du superflu,
Ouvre nos yeux à Ta présence,
Eveille nos cœurs à Ta parole,
Qu’elle soit notre nourriture,
Celle qui nous permet d’avancer et de toujours espérer