« L’Esprit Saint agit
et ouvre les cœurs »
Ce 26 avril 2023, lors du pèlerinage diocésain à Lourdes, 9 hospitaliers ont eu la joie de s’engager publiquement au sein de l’Hospitalité. Lire l’homélie de Mgr Stanislas Lalanne.
Chers amis, à chaque fois que j’écoute cet évangile, ma tentation est forte de n’entendre que l’invitation à prier le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers. Nous pensons trop rapidement que ce texte s’adresse d’abord aux prêtres, aux missionnaires, à ces hommes et ces femmes qui ont donné toute leur vie pour le service de leurs frères, et être ainsi ouvriers du Royaume.
Chez Luc, Jésus vient à peine d’envoyer les Douze en mission : « Ne prenez rien pour la route, ni bâton, ni sac, ni pain, ni argent, ni tunique de rechange. » Il les appelle et les envoie pour proclamer le règne de Dieu, annoncer la Bonne Nouvelle, faire des guérisons. Il y a urgence pour la mission. Ils sont douze et l’Eglise est à fonder : à douze, ils représentent les douze tribus d’Israël.
Et voici que Jésus recommence à appeler et à envoyer ! Non plus 12, mais 72. Un nombre symbolique qui désigne les peuples du monde entier, les 72 peuples de la terre dont parle le livre de la Genèse.
L’Esprit Saint n’a pas attendu l’action des disciples pour agir et ouvrir les cœurs… La mission n’est plus confiée seulement à quelques-uns, elle s’adresse à tous les peuples de la terre.
La moisson est abondante et les ouvriers peu nombreux. Vous avez entendu : il est question non pas de semailles mais de moisson ! En d’autres termes, cela signifie que l’Esprit Saint n’a pas attendu l’action des disciples pour agir et ouvrir les cœurs… Et puis, la mission n’est plus confiée seulement à quelques-uns. Et elle s’adresse à tous les peuples de la terre.
L’évangéliste ne cesse de rappeler que la Bonne Nouvelle n’est pas seulement à destination du peuple élu. Les 72 sont envoyés 2 par 2. Ce ne sont pas des individus isolés qui sont appelés. Ils sont désignés et envoyés 2 par 2, pour être des témoins. Pourquoi ? Un témoin seul risque fort d’être perçu comme un gourou ou un faux prophète. L’annonce de l’Evangile supporte mal de faire cavalier seul. A l’époque, pour qu’un témoignage soit valable, il fallait deux ou trois témoins.
Etre envoyés deux par deux, c’est être appelés à faire équipe avec un autre. C’est découvrir et prendre en compte l’autre, différent de soi. C’est faire ses premières armes avec les rudiments de la vie communautaire. C’est faire l’expérience de l’Eglise.
Vous comprenez pourquoi j’insiste pour que dans notre diocèse les chrétiens puissent se retrouver en petites fraternités paroissiales afin de faire l’expérience de l’Eglise, de partager la Parole et de se rendre disponible pour l’annonce de la Parole, pour la mission…
Partir 2 par 2 ouvre l’avenir à ceux qui sont envoyés ensemble. Etre envoyés 2 par 2 conduit à découvrir au long de la route parcourue que l’autre nous met toujours en appétit pour habiter le futur.
Faire l’expérience de l’Eglise, c’est aussi participer à la marche des compagnons d’Emmaüs au soir de Pâques. Pouvoir, avec un frère ou une sœur, parler et reparler du chemin parcouru, des personnes rencontrées, des événements vécus, au point de reconnaître dans la force du partage et la grâce du dialogue le visage de celui qui rejoint toujours en chemin ceux-là mêmes à qui il donne mission de prendre la route. Et d’aller dans toutes les villes et dans les localités où lui-même devait aller.
Cette marche 2 par 2, c’est aussi la marche des premiers missionnaires comme Paul et Barnabé, Barnabé et Marc, Paul et Silas. « Là où deux ou trois sont en mon nom, je suis au milieu d’eux. » Partir 2 par 2 ouvre l’avenir à ceux qui sont envoyés ensemble.
Avez-vous déjà remarqué combien ne pas être seul est important pour aller loin, pour avancer, pour grandir ? Juste quelques exemples :
- En cordée, un alpiniste est rarement seul : il y a toujours au moins quelqu’un d’autre qui fait équipe avec lui.
- Sur un voilier ou sur un bateau de pêche, chacun aussi a sa place à tenir et son rôle à jouer.
- La main tendue à un malade sur un lit d’hôpital, les mots échangés, la parole du regard croisé sont aussi l’expression de ce que nous sommes appelés à vivre avec d’autres en témoins de la Bonne Nouvelle.
Etre envoyés 2 par 2 conduit à découvrir au long de la route parcourue que l’autre nous met toujours en appétit pour habiter le futur.
Avec d’autres, nous allons toujours plus loin que le possible. Portés par l’amitié, la fraternité, la force du groupe, portés aussi par la mission confiée, nous repoussons les frontières de nos limites personnelles.
C’est bien ce que nous expérimentons dans ce pèlerinage à Lourdes ! Seuls, nous avançons aussi loin que possible. Mais curieusement, avec d’autres, nous allons toujours plus loin que le possible. Portés par l’amitié, la fraternité, la force du groupe, portés aussi par la mission confiée, nous repoussons les frontières de nos limites personnelles.
J’ai toujours été surpris de voir la complicité entre des personnes appelées à une même aventure, à un même projet qui donne sens à leur existence. La mission reçue les conduit sur le chemin de la joie.
Aventure des disciples, notre propre aventure aussi, nous qui sommes appelés : à ouvrir des voies nouvelles, à risquer un pas vers l’inconnu, à oser une rencontre, une parole, à être chacun à notre façon témoin de la parole reçue pour faire advenir le règne de Dieu.
Voilà à quoi nous sommes appelés, avec les 12, avec les 72 et, comme eux, pour dire Dieu aux hommes et aux femmes de ce temps. Chacun est appelé à la manière des 72 ! Mais ce matin, c’est l’envoi en mission de 9 hospitaliers.
Depuis plusieurs années, ils sont déjà en tenue de service. Mais ce matin, ils vont être invités à s’engager publiquement au sein de l’Hospitalité Notre-Dame de Lourdes de notre diocèse.
Occasion de rendre grâce pour tous les hospitaliers qui durant le pèlerinage à Lourdes mais aussi tout au long de l’année, sont au service de nos frères et sœurs malades. Amen.
Mgr Stanislas Lalanne
26 avril 2023
