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Aux racines bibliques du jubilé
Depuis le dimanche 12 janvier 2025, l’année jubilaire est ouverte dans le diocèse de Pontoise. Ce jubilé est une occasion privilégiée pour renouveler notre foi et nous réconcilier avec Dieu en entrant, tel un pèlerin, dans la tradition biblique et millénaire de l’Année Sainte.
La tradition de l’année jubilaire est profondément enracinée dans l’Ancien Testament. A l’époque, le temps était mesuré en cycles de sept jours et de sept ans, régulant la vie religieuse, sociale et économique de l’Israël biblique : après sept années sabbatiques, soit 49 ans, venait l’année jubilaire, appelée en hébreu yobel qui dans la Bible signifiait « trompette » et dont on jouait pour annoncer l’année jubilaire tous les 50 ans, après 7 années sabbatiques. De ce « yobel » vient le mot actuel jubilé.
Après sept années sabbatiques, soit 49 ans, venait l’année jubilaire, appelée en hébreu yobel qui dans la Bible signifiait « trompette » et dont on jouait pour annoncer l’année jubilaire…
Dans le Livre du Lévitique, les dispositions concernant l’année jubilaire font partie de la section appelée « Code de Sainteté » (Lv 19-25), indiquant leur importance particulière pour la récupération et le maintien de la sainteté : « Tu compteras sept années sabbatiques, soit sept fois sept ans, de sorte que le temps des sept années sabbatiques fera quarante-neuf ans. Le dixième jour du septième mois, tu feras sonner la trompette. (…) Vous sanctifierez la cinquantième année et proclamerez la libération dans le pays pour tous ses habitants. Ce sera pour vous un jubilé – chacun de vous retournera à sa propriété et chacun retournera à son clan. Toute cette cinquantième année sera pour vous une année jubilaire » (Lv 25, 8-12).
Ces dispositions supposaient une mesure et une expérience conscientes et précises du temps. Ne se contentant pas du rythme de sept jours et de sept ans, les Israélites l’ont étendu à toute la vie humaine, qui dans l’Antiquité durait en moyenne environ cinquante ans. Beaucoup de gens ne vivaient pas jusqu’à l’année jubilaire, donc la vivre était un privilège.
Le moment précis du début des célébrations était fixé à Yom Kippour, le Jour de l’Expiation, le jour le plus saint du calendrier juif. Et le fait que l’année jubilaire commence le Jour de l’Expiation obligeait et permettait un renouvellement profond des liens individuels et communautaires avec Dieu.
![2501jubile Yobel Groupe de jeunes en plein Air](https://www.catholique95.fr/wp-content/uploads/2025/01/2501jubile_yobel.png)
« Yobel » signifie « trompette » dont on jouait pour annoncer l’année jubilaire tous les 50 ans
Ce temps exceptionnel comportait des obligations morales spécifiques. La caractéristique la plus marquante du jubilé, tout comme de l’année sabbatique, était la libération universelle de tous ceux qui étaient soumis et dépendants des autres. Cette approche exprime le souvenir de la libération de l’esclavage en Egypte et de l’alliance des Israélites avec Dieu. Mais, contrairement à l’année sabbatique, tous les esclaves devaient retrouver leur liberté et leur dignité. Vivre le jubilé se fait donc dans deux perspectives : verticale – orientée vers Dieu, et horizontale – sensibilisée à l’homme et à la justice sociale, c’est pourquoi les dettes étaient remises et une attention particulière était portée aux pauvres et aux nécessiteux.
Vivre le jubilé se fait dans deux perspectives : verticale – orientée vers Dieu, et horizontale – sensibilisée à l’homme et à la justice sociale.
Le jubilé est également un temps de retour des terres à leurs propriétaires d’origine et de libération des Israélites vendus en esclavage. En l’année jubilaire, chaque Israélite reprenait possession de l’héritage familial qu’il avait précédemment vendu ou perdu. Comme pour l’année sabbatique (tous les sept ans), il fallait, encore plus radicalement, rétablir la justice perturbée pour imiter la bonté et la miséricorde de Dieu. L’ajout « Tu craindras ton Dieu, car je suis l’Éternel, votre Dieu ! » ne laisse aucun doute que Dieu lui-même veillera au respect du jubilé.
En façonnant la vie du peuple élu de Dieu, les Jubilés étaient le ciment de son unité : l’égalité fondamentale de tous les Israélites devant Dieu et entre eux.
Toutes les dispositions concernant l’année sabbatique et l’année jubilaire étaient-elles scrupuleusement respectées ? Les avis des commentateurs de la Bible et des historiens de l’Israël ancien sont partagés. Et pour nous aujourd’hui, il est important de comprendre que ces prescriptions concernant les jubilés ne reflétaient pas tant la réalité qu’elles ne visaient à la façonner. La dimension prophétique des jubilés consistait en une orientation claire vers l’avenir, qu’il fallait constamment améliorer. En façonnant la vie du peuple élu de Dieu, elles constituaient une « prophétie de l’avenir » et étaient le ciment de son unité : l’égalité fondamentale de tous les Israélites devant Dieu et entre eux.
Une réalité plus qu’actuelle pour nous, qui sommes tous invités aujourd’hui, à être des « Pèlerins d’espérance » toujours égaux dans l’amour du Père.
Caroline Montsarrat
Janvier 2025
Sources :
– « Les institutions de l’Ancien Testament« , Roland de Vaux
– « Lévitique 25 : Année sabbatique et Jubilé dans le contexte des traditions bibliques et des cultures du Proche-Orient ancien », par Olivier Artus publié dans Transversalités par l’ICP, janvier-mars 2014
– « Le jubilé dans lévitique 5« , par Didier Luciani dans la Revue théologique de Louvain
L’influence des traditions du Proche-Orient ancien
![Hammurabi Jeunes Unicef](https://www.catholique95.fr/wp-content/uploads/2025/01/Hammurabi.png)
Code de Hammurabi, roi de Babylone ; face avant (détail)
Il existe des éléments communs entre le jubilé biblique et les édits royaux de Misarum/Andurarum (qui signifie libération) de la Mésopotamie du deuxième millénaire avant JC. où l’on envisageait la libération des personnes tombées en esclavage pour dettes. » Lorsque le roi a promulgué un mešarum pour le pays, les arriérés des fermiers, des bergers et des agents des provinces, leurs paiements sont remis ». dans l’édit de mišarum du roi Ammi-tsaduqa.
Le code de Hammurabi (1792-1750 avant notre ère) connaît, lui aussi, une disposition envisageant la libération des esclaves pour dettes. Celle-ci est décrite comme une libération périodique (§ 117) : Si un homme a été contraint par une obligation, et s’il a dû vendre son épouse, son fils ou sa fille, ou bien s’il a été lui-même livré en sujétion, pendant 3 ans, ils travailleront dans la maison de leur acheteur ou de leur assujettissant, la quatrième année, leur libération interviendra.
Sce : « Lévitique 25 : Année sabbatique et Jubilé dans le contexte des traditions bibliques et des cultures du Proche-Orient ancien », par Olivier Artus
Le Jubilé aujourd’hui
« Sans être dans le prolongement direct de celui de la Bible, le Jubilé auquel le Pape nous convie, ne propose pas autre chose que d’imiter l’agir divin. En attirant l’attention des chrétiens sur la nécessité de la conversion, sur la vie chrétienne comme pèlerinage vers la maison du Père, sur l’importance des vertus de foi, d’espérance et de charité, sur l’unité du peuple de Dieu, sur la redécouverte des sacrements, sur l’option préférentielle pour les pauvres, sur la promotion de la famille et le dialogue entre cultures différentes, il honore des institutions fondamentales présentes dans le texte du Lévitique. »
« Le jubilé dans lévitique 5 »,
par Didier Luciani dans la Revue théologique de Louvain