Homélie de Stanislas Lalanne
Appel décisif des catéchumènes adultes
Cathédrale Saint-Maclou – Dimanche 5 mars 2023

Lucide donc, Jésus s’est alors mis en route, se choisissant des disciples pour l’accompagner. Eux aussi ont quitté leur pays, leur père, pour répondre à un appel, habités par la seule confiance.

Juste avant le récit d’aujourd’hui, Jésus leur a demandé qui il était à leurs yeux. Pierre a répondu : « Le Christ, le Fils du Dieu vivant ». Aussitôt, Jésus les a avertis : cela n’épargnerait pas les difficultés du chemin. « Il lui fallait aller à Jérusalem, y souffrir beaucoup, y être tué et, le troisième jour, ressusciter. »

« Non, cela ne t’arrivera pas », lui dit Pierre. Les apôtres connaissent à leur tour la tentation. Jésus prend alors avec lui Pierre, Jacques et Jean sur la montagne, lieu de la rencontre de Dieu. Un moment d’intense lumière. Un éclair dans la nuit. Juste de quoi continuer ensuite le chemin.

Sans trop comprendre, car il s’agit déjà des premières lueurs de Pâques qui se reflètent sur le visage de celui qui vient d’annoncer sa mort, les trois disciples se sont vus confirmée l’identité de Jésus.

Mais pas question de s’installer, il faut redescendre et marcher vers Jérusalem, avec lui. La souffrance ne sera pas épargnée, mais elle aura un sens. « Prends ta part des souffrances liées à l’annonce de l’Evangile », dit saint Paul à Timothée.

Cette anticipation de Pâques va permettre aux apôtres de vivre ce chemin difficile avec la certitude que la Vie aura le dernier mot. Cette expérience de la Transfiguration, de la lumière du Christ qui irradie la vie a été aussi la vôtre. Vous avez reconnu le Christ et vous l’avez écouté. Vous avez alors demandé à recevoir le baptême.

Vous me l’avez confié dans vos lettres qui m’ont fortement touché, par leur vérité et leur simplicité. Je ne peux pas toutes les citer ! Juste quatre.

« Depuis mon enfance, j’ai toujours ressenti une présence bienveillante et rassurante autour de moi, mais je n’étais pas prête à mettre un nom dessus. Je ne voulais pas accepter une vérité qui me faisait peur, car n’ayant pas d’éducation religieuse, elle remettait en cause tout ce que l’on m’avait appris. Elle bousculait toute ma vie et ce n’était pas possible ! Plus les années passaient plus je ressentais un vide dans mon cœur, sans pouvoir le combler. Lorsque j’ai perdu ma grand-mère, il y a quelques années, j’ai eu comme une révélation, comme si mes yeux s’étaient ouverts pour la première fois dans ce monde. Je comprenais enfin ce qui me manquait dans ma vie : Notre Seigneur. Son arrivée dans ma vie a été comme une vague sur un rocher, elle a tout bousculé, transformé, chamboulé avec une vitesse incroyable. »

« C’est lors de la préparation au baptême de notre dernière fille, une soirée de discussion, de partage sur le baptême, au moment où l’animatrice donnait des explications sur le sacrement du baptême que j’ai été prise d’émotions par ces mots, ses paroles, qui me touchaient personnellement comme si elle ne me parlait qu’à moi (nous étions au moins dix), j’ai eu la sensation d’être appelée. Une chaleur m’a envahie comme un souffle qui me guidait. Toutes ses explications étaient pour moi. Sans le savoir cette dame répondait à chacune de mes interrogations, à mes doutes. »

« Née d’une famille mixte, mes parents ont choisi de nous laisser choisir notre voie spirituelle. J’ai donc grandi sans attache religieuse mais certaine que Dieu existait. En 2012, j’ai rencontré mon mari, un homme bon comme je n’en ai jamais rencontré, issu d’une famille catholique et pratiquante. En entrant dans cette famille, je suis devenue témoin de la foi qui les anime et qui les porte au quotidien. C’est lors d’un temps de prière à la fin d’une réunion de préparation au mariage, que la grâce de Dieu est arrivée en moi : une chaleur, une lumière que j’ai du mal à expliquer. Une émotion incontrôlable m’a envahie, mes larmes coulaient. J’ai alors compris que le Christ m’appelait à le suivre. »

« Je crois que j’ai la foi depuis l’enfance. Mais cette foi, qui aujourd’hui est en moi, s’est réveillée ou plutôt a repris sa place à la naissance de mon fils. Lorsque mon regard a plongé dans le sien, que j’ai ressenti sa chaleur, entendu son cœur battre, le Seigneur seul m’a permis de « fabriquer » cet être à qui il a donné une âme si délicate, pleine d’amour, de force et de courage, avec une personnalité des plus exceptionnelle. Cette foi m’a permis de ne plus avoir peur d’être abandonnée. Je sais que le Seigneur restera toujours près de moi. »

Pour terminer, je mets l’accent sur trois points. Le premier, c’est qu’on ne devient pas chrétien tout seul, de manière isolée, mais ensemble, en Eglise. Bien sûr, l’expérience de la foi est personnelle. Mais vous n’êtes pas les seuls à croire, vous êtes entourés de votre parrain ou marraine, de tel membre de votre famille ou de vos amis, de vos accompagnateurs, de prêtres de vos paroisses.

Dans les témoignages qui ont accompagné vos lettres, plusieurs accompagna-teurs ont souligné qu’avec vous ils avaient redécouvert l’Evangile et grandi dans leur propre foi. L’échange et la rencontre ne se vivent pas en sens unique, mais sont source d’enrichissement mutuel.

Vous faites aujourd’hui l’expérience de l’Eglise. Même si, pour Dieu, chacun de vous est unique, il fait alliance avec vous au sein d’un peuple.

Vous êtes originaires de différents pays, de différentes cultures, vous avez des âges différents, chacun de vous a son histoire sainte unique, mais par l’alliance de Dieu avec vous, Dieu désire vous sauver ensemble, en peuple. Ce qui signifie que vous ne pourrez pas vivre la foi de manière isolée, mais en communauté, en Eglise, rassemblement de ceux qui sont appelés.

Certains de vous deviendront accompagnateurs de catéchumènes, d’autres participeront à un groupe de prière, à une chorale, au Secours Catholique…  D’autres vont devenir catéchistes ou animateurs d’aumônerie, d’autres encore participeront à l’animation liturgique… Chacun recevra une mission pour être non seulement disciple mais apôtre.

Un deuxième point : plusieurs d’entre vous me confient que depuis le commencement de votre préparation, votre vie s’est transformée. Vos accompagnateurs en témoignent aussi. Avec eux, vous avez donc découvert que suivre le Christ conduit à changer quelque chose dans sa manière de vivre, d’être avec les autres, son regard sur eux, sur le monde, sa manière d’utiliser les biens, sa manière de donner et recevoir le pardon.

Et mon troisième point : être disciple du Christ, c’est accepter de vivre un véritable combat spirituel comme les apôtres après la Transfiguration. Le récit des tentations dimanche dernier est clair. Jésus a été tenté tout au long de sa vie. Et pas seulement au désert ! Il a eu à lutter contre toutes formes de tentations mais il en a été victorieux, en se nourrissant avant tout de la Parole de Dieu.