Café-rencontre à Saint-Ouen-l’Aumône
Régulièrement, des personnes porteuses de handicap, des proches, des accompagnants… se retrouvent pour un temps de partage et de débats dans le café du cinéma Utopia de Saint-Ouen-l’Aumône. Les échanges y sont très libres et très profonds…
En ce mercredi 9 novembre 2022, nous voici huit, attablés pour notre « café-rencontre » mensuel, dans la salle du café du cinéma Utopia de Saint-Ouen-l’Aumône, toujours aussi ouvert et convivial. Le Père Henry, prêtre référent pour les différentes branches de la pastorale de la santé nous partage son itinéraire. L’accompagnement de sa grand-mère puis de sa mère, malades, l’a sensibilisé à cette présence des personnes en souffrance, dans l’Eglise. Puis, au Nigeria (son pays d’origine), et ensuite en mission au Tchad, il raconte qu’il a pris exemple sur les modèles de compassion, d’accueil, de certains de ses frères prêtres. Tout ceci l’a préparé à la mission de prêtre accompagnateur des EHPAD et hôpitaux du Vexin, dans notre diocèse de Pontoise. Puis à celle d’accompagnateur de toute la Pastorale santé.
En fin de rencontre, il nous partagera combien nos échanges lui permettent de mieux comprendre la vie, les difficultés, des personnes en situation de handicap. Et donc, comment mieux les accompagner.
Pour le père Henry, ces échanges lui permettent de mieux comprendre la vie, les difficultés, des personnes en situation de handicap. Et donc, comment mieux les accompagner.
G. vient pour la première fois. Sourd profond, bénéficiant d’un implant cochléaire (en savoir plus www.jeveuxentendre.fr), il nous présente cette technique, ses limites… De là, nous parlons des « boucles auditives » (voir vidéo ci-dessous) qui existent dans certaines églises… pas toutes, hélas. Occasion de lier conversation avec un des responsables du cinéma qui cherche à implanter une telle boucle dans au moins une des salles. Notre petit groupe devient « missionnaire » pour l’accompagnement du handicap dans un lieu laïc ! Puissions-nous l’être aussi dans notre Eglise !
G. nous partage aussi combien il trouve important de parler de « son » handicap, et non de tous les handicaps. Trop de préjugés, d’a priori, circulent, et trop de gens s’autoproclament « experts » en ne laissant pas parler les premiers concernés, les personnes en situation de handicap elles-mêmes !
► Voir notre vidéo sur la boucle magnétique
Notre groupe a partagé autour du thème du jour : « Qu’est-ce que je retiens de plus important dans ma vie ces dernières semaines ? » (voir encadré). Tout au cours de cette rencontre, nous avons notamment évoqué les difficultés quotidiennes des personnes en situation de handicap. En particulier de tous les « handicaps invisibles ». Plusieurs d’entre nous racontent des violences verbales, parfois même physiques, par exemple, au moment de passer en caisse, sur une file prioritaire, avec leur carte d’invalidité, alors que leurs difficultés ne se voient pas.
Nous avons évoqué les difficultés quotidiennes des personnes en situation de handicap. En particulier de tous les « handicaps invisibles ». Plusieurs d’entre nous racontent des violences verbales, parfois même physiques…
Il faut reconnaitre que ce n’est pas évident. Il y a peu de temps qu’il y a des logos spécialisés pour chaque type de handicap. Avant, c’était « handicap = fauteuil roulant » ! Et aujourd’hui encore, la carte d’accès aux places de parking réservées, ou pour bénéficier d’un accompagnateur dans les transports en commun, est siglé d’un fauteuil roulant, quel que soit le handicap !
Pourtant ces « facilités » sont un droit et il faut l’exercer. Il faut pouvoir mettre en œuvre ces priorités…
Nous sommes seuls dans la salle du café. Nous en profitons pour lire la lettre des Evêques de France « bouleversés et résolus » qui s’adresse à tous les fidèles. Et terminons en portant toutes ces difficultés dans la prière du Notre Père.
► Notre prochaine rencontre au café Utopia de Saint Ouen-l’Aumône aura lieu le Mercredi 7 Décembre 2022.
L’un de nous a participé au pèlerinage Foi et Lumière à Lourdes,
qui a ressemblé 3000 participants !
Any Tournesac
Novembre 2022
Nous avons partagé autour du thème : « Qu’est-ce que je retiens de plus important dans ma vie ces dernières semaines ? » Témoignages…
- Après le décès de maman, je vis toujours chez mon père. Je désire vraiment retourner chez moi. Ce qui me manque surtout c’est de la liberté, des temps de pause pour moi… Je vais deux jours par semaine à l’hôpital de jour. Une fois par mois, je retrouve les ami(e)s que je me suis fait(e)s lorsque j’étais bénévole à la Croix-Rouge. C’est important moralement pour moi. Cette activité me manque ; le local n’est plus attribué et tous les bénévoles n’ont pas pu être recasés dans d’autres équipes. Même pendant la crise du Covid, nous avions pu continuer.
- Ma situation actuelle est très difficile. Mon compagnon est malade du cancer. Nous sommes assez isolés, nous n’avons que très peu de soutien. Les voisins sont super, mais ce n’est pas évident sur le plan mental ; c’est lourd à porter. Je ne peux pas compter sur ma famille.
Mes sœurs sont loin et les relations ne sont pas bonnes. Ma maman est en maison de retraite, et elle ne comprend pas la situation. Elle voudrait venir chez moi pour Noël, mais ce n’est pas possible ! Elle est loin et je ne suis pas sûre de pouvoir aller la voir. Mon compagnon a besoin de ma présence au quotidien.
J’ai une petite chienne, Zézette. C’est un réconfort pour nous deux. Elle ressent ce qui se passe, elle a du mal à comprendre que mon compagnon n’aille plus la sortir comme avant. Nous avons aussi un chat, Caramel. Ils sont complices et jouent bien ensemble.
Nous avons dû réorganiser toute la maison, parce qu’il y a beaucoup de matériel pour les soins de mon compagnon. Ce n’est pas grave, mais il a fallu réfléchir à tout.
Je suis maniaco-dépressive et je vois très mal. Je suis sous curatelle renforcée… Actuellement, nous avons le lave-linge et le four en panne… C’est compliqué.
Nous avons une voisine infirmière, à qui j’ai pu parler de mes difficultés. Elle ne juge pas, et cela me soulage… - J’ai participé au pèlerinage Foi et Lumière à Lourdes. Nous étions 3000 participants, belges et français. Nous avons rempli deux TGV. Il y avait beaucoup de fauteuils roulants, de brancardiers. Il y avait un groupe d’acteurs qui faisait les animations dans la salle à Saint Bernadette. Il y a eu beaucoup de joies, de paix, d’amour. Pour moi, j’ai vraiment ressenti la joie de la rencontre, la joie d’être à Lourdes. Cela m’a fait tout drôle ! Cela m’a bouleversé. J’ai déjà fait plusieurs pèlerinages et je connais bien la ville de Lourdes. J’ai retrouvé la chaleur, l’ambiance… Et j’ai retrouvé une paix intérieure que j’avais perdue.
- Notre maison familiale en Bretagne est vendue. C’est important, ma grand-mère a acheté cette grande maison en 1960. Elle a eu beaucoup d’enfants ; mais la maison nous revenait, mes frères et sœurs et moi, à la mort de mes parents. Nous avons fait le maximum pour l’entretenir mais ce n’était plus possible ; il y avait trop de travaux. Il a fallu du temps pour que nous soyons tous d’accord pour cette vente. C’est toute mon enfance, mon adolescence, qui se trouvent là ! Mes enfants aussi… Ce qui est bien, c’est que c’est un cousin qui la rachète, elle reste dans la famille, et la mairie qui la voulait ne l’aura pas !
Nous avons pu nous y retrouver cet été, et c’était bien. Nous étions nombreux et j’ai eu l’impression de retrouver mon enfance. Cette maison est vivante ! Il a fallu vider plus de 40 ans de vie, de souvenirs. Mais nous l’avons fait dans la joie. Je n’ai pas de peine puisque cette maison est vivante, dans la famille ! Mes enfants ont eu la joie de la connaître, cette maison qui est pour moi la maison du bonheur. Elle fait partie de ma vie et il faut que j’apprenne à m’en séparer ! - J’ai des difficultés à m’orienter dans des lieux que je ne connais pas. Mon frère qui est en maison de retraite de l’hôpital de Pontoise, est hospitalisé depuis hier. J’y vais tous les mardis et j’ai été invitée à aller le voir aux urgences où il était. On avait beau m’expliquer comment faire pour y aller, je n’y parvenais pas. J’ai demandé à ce qu’on m’accompagne. Les personnes ne se rendaient pas compte que j’ai un handicap sensoriel et que je ne pouvais pas. Je n’ai pas pu voir mon frère ! Mon handicap sensoriel ne se voit pas et les gens ne comprennent pas ! Le médecin m’a appelé ce matin pour me donner des nouvelles. Mon frère va mieux…